Décrets, LRU, masterisation, contractualisation alternative des doctorants bimensuels à tendance unionistes, baisse du taux d'inox dans les serrures en acier de douze ans d'âge... les réformes du gouvernement sont devenues tellement compliquées que seuls les enseignants-chercheurs les plus chevronnés y comprennent quelque chose et se mobilisent.
Ce guide est pour tous les étudiants, précaires et autres connards de prolos qui pigent rien à la bureaucratie libérale des chefs.
Tu hésites à partir en mouvement, tu n'es pas sûr d'avoir bien compris ce qu'était la réforme, tu ne sais même pas si c'est une réforme, tu as peur d'intervenir en AG devant un parterre de syndicalistes chevronnés, rompus aux joutes oratoires vaines et gracieuses, tu te sens laid et gras, tu portes un regard désabusé sur un monde qui t'échappe, que tu scrute, daignant parfois lui concéder une morne oeuillade , un plissement de paupière, une léger sourire, un début d'érection, une brève sécrétion vaginale... bref tu t'ennuies et tu n'as pas vraiment envie de compulser des nuits entières l'ensemble des décrets pondus par un obscur énarque sans charisme en mal de reconnaissance, de pouvoir qui trouve qu'il n'y a pas assez de petits pois dans les boites de petits pois carottes car après tout on achète des petits pois ET des carottes, pas des carottes accompagnées, de petits pois, merde !
Bref (c'est le deuxième "bref" de cet article : certains lecteurs commencent à se rendre compte que je n'ai rien à dire et que je meuble ma soirée en attendant mon rencart qui n'arrive pas) tu doutes, et c'est bien normal à ton âge de se poser des questions :
Que faire après la fac ?
Comment gagner des tunes facile sans me faire chier ?
Comment choper un/une Erasmus avant la fin du semestre ?
La taille de mes bras est-elle conforme au traité des proportions établi par Giordano della Fresco en 1459 ?
Les renards ne feraient-ils pas mieux de porter des perruques ?
Pourquoi ai-je tout le temps faim à 18h, avant d'aller à ma réunion ?
La neige ?
Augusto Pinochet jouait-il avec son caca dans sa salle de bain ?
Bref (ah ah ! Vous vous y attendiez pas à celui là ?!) personne ne peut rien pour toi, tu es perdu, tu erres sans lumière dans les tréfonds d'une ville qui te broye, tu regrettes ta province natale, les confitures de madame Bon, la fermière communiste du coin, les seins accueillants de Gretcha, ton premier amour lycéen, la douce chaleur violacée de la chambre de Chloé, ta meilleure amie pour la vie en CM2, les courses dans la neige, le verglas, les lèvres gercées, la main d'Aliénor, la table de 4, monsieur Bouzier, les dos de papa, la masturbation devant le porno soft de la 6, la Game boy : fais toi une raison camarade, tout ceci est derrière toi, tes souvenirs sont autant de pièges sournois tendus par la bourgeoisie. Tandis que tu t'apitoies sur ton sort et que tu regardes en arrière l'âge d'or de la paresse enfantine tu oublies de te battre. Saisi toi d'un marteau d'airain et frappe d'un grand coup le corps décharné de l'Etat, les institutions corrompues qui t'écrasent, qui tuent en toi l'amour de la vie. Valérie Pécresse t'empêche de gambader tout nu dans la Sorbonne en mangeant des tortillas !
Dieu (en fait c'est Trotski qui l'a fait mais je ferme ma gueule parce que je diffuse cet article à côté d'un anarchiste), dans son immense bonté a donné aux hommes une faculté unique, qu'il ne partage avec aucun autre mammifère (à part le kapibara, sorte de gros ragondin d'Amérique du sud qui ressemble à un dirigeant de l'Unef) : la lutte ! Affiches, tracts et banderoles ne sont rien face à ta force inéluctable et virile d' étudiant frustré !Met toi en marche seul et vaillant, le front haut et fier, luisant d'acné tardive : insurge-toi contre la domination impériale du capitalisme mondialisé et la masterisation des concours de l'enseignement. Libère toi de tes chaînes camarade, brûle les décrets sur la contractualisation des doctorants, arrache de tes dents carnassières les pans déconfits d'une Sorbonne assoupie : révolte toi, et, ivre de ta puissance, balaye d'un revers de la main la horde de cafards grouillants qui te gouvernent.
P.S : non c'est un blague, va en cours et soûle toi le vendredi soir, comme d'habitude.